K'OUEN / LE RECEPTIF 2
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Trigrammes nucléaires
K'OUEN
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et K'OUEN
— —— —— —Le maître de l'hexagramme est le six à la .2ème place. L'hexagramme K'ouen,
" le réceptif", représente la nature de la terre. "Le réceptif" traduit en outre la nature du serviteur, et la .2ème place est celle du serviteur. En outre, le caractère quadruple du réceptif : "malléable", "abandonné" 9, "modéré", c'est-à-dire central, "juste", c'est-à-dire faible à une place faible, est parfaitement exprimé par ce trait. C'est pourquoi il est le maître de l'hexagramme. Les termes du jugement : "S'il veut se mettre en avant, il s'égare, mais s'il suit, il trouve une direction" et : "Il est avantageux de trouver des amis à l'ouest et au sud et de se passer d'amis à l'est et au nord " se rapportent tous à la nature d'un fonctionnaire.
L'hexagramme est rattaché au dixième mois
(Novembre-Décembre) où la force obscure présente dans la nature amène la fin de l'année.
La connexion des hexagrammes entre eux
Le RÉCEPTIF est malléable.
LE JUGEMENT:
Le RÉCEPTIF opère une sublime réussite
[432]
favorisant par la persévérance d'une jument.
Si l'homme noble doit entreprendre quelque chose et veut se mettre en avant, il s'égare ; mais s'il suit, il trouve une direction.
All. hingebend. Voir vol. 1, p. 27 note.
(N.d.T.) Il est avantageux de trouver des amis à l'ouest et au sud, et de se passer d'amis à l'est et au nord.
Une persévérance paisible procure la fortune.
Commentaire sur la Décision
Parfaite en vérité est la sublimité du RÉCEPTIF ; Tous les êtres lui doivent leur naissance, car il reçoit avec abandon l'élément céleste.
C'est l'explication du mot
" sublime " contenu dans le jugement.
La grandeur du RÉCEPTIF est désignée comme parfaite. Est parfait ce qui atteint l'idéal. Ainsi se trouve exprimé l'état de dépendance du réceptif par rapport au créateur. Tandis que le créateur est celui qui engendre et auquel les êtres doivent leur commencement, puisque l'âme naît de lui, le réceptif est ce qui enfante : il reçoit en lui la semence du principe céleste et donne aux êtres leur organisation corporelle.
Le RÉCEPTIF, dans sa richesse, porte toutes choses. Sa nature est en harmonie avec l'illimité. Il embrasse toutes choses dans son ampleur et illumine toutes choses dans sa grandeur. C'est par lui que les êtres individuels parviennent à la réussite.
C'est l'explication du mot
" réussite " contenu dans le jugement. Il y a également ici une contrepartie complémentaire du créateur. Tandis que le créateur protège les choses, c'est-à-dire les couvre d'en haut, le réceptif les porte comme un soubassement à la durée indéfinie. Son essence est un accord infini avec le créateur. C'est de là que découle sa
[433] réussite. Tandis que le mouvement du créateur est dirigé vers l'avant (mouvement rectiligne) et que son repos est l'immobilité, le repos du réceptif est de se fermer et son mouvement est de s'ouvrir. Dans l'état de repos, c'est-à-dire la fermeture, il embrasse toutes choses comme dans un immense sein maternel. Dans l'état de mouvement, c'est-à]dire quand il s'ouvre, il laisse entrer la lumière divine et illumine ainsi toutes choses. Sa réussite se fonde sur le fait qu'il se manifeste dans la réussite des êtres. Tandis que la réussite du créateur consiste en ce que les êtres individuels reçoivent leur forme déterminée, la réussite du réceptif fait qu'ils prospèrent et se déploient.
La jument fait partie des créatures de la terre ; elle court sur la terre sans connaître de limites. Malléable, abandonné, favorisant par la persévérance : ainsi l'homme noble a une direction pour sa conduite.
Tandis que le créateur est symbolisé par le dragon qui vole vers le ciel, le réceptif est représenté par la jument
(mélange de force et de don de soi plein d'abandon) qui court sur la terre. La nature malléable et abandonnée ne doit pas exclure la force, car celle-ci est nécessaire au réceptif, pour qu'il soit retenu comme auxiliaire du créateur. La force se traduit dans ces mots : " Favorisant par la persévérance", que le Commentaire présente comme le modèle de la conduite de l'homme noble. (La ponctuation s'écarte de celle du Jugement. D'après le Commentaire on doit – à cause de la rime – traduire littéralement : "Favorisant par la persévérance : ainsi l'homme noble a où aller." Dans le jugement, par contre, la plupart des commentateurs rattachent les derniers mots à ce qui suit : "Si l'homme noble a quelque chose à entreprendre et agit prématurément, il s'égare
")
Se mettre en avant amène la confusion parce que l'on perd son chemin. C'est en suivant avec abandon que l'on acquiert la position permanente. A l'ouest et au sud on trouve des amis, si bien que l'on se joint à des gens de même espèce. A l'est et au nord on doit se passer d'amis, si bien que finalement l'on parvient à la fortune.
[434]
Si le réceptif voulait aller lui-même de l'avant, il s'écarterait de sa nature propre et se tromperait de chemin. Lorsqu'il s'abandonne et suit le créateur, il parvient à la position permanente qui est la sienne.
L'ouest et le sud sont les points où sont placés les trigrammes féminins selon la disposition du roi Wen.

K'ouen est ici au milieu des filles. L'est et le nord sont au contraire la place des trigrammes masculins
(
K'ien et les fils), si bien que le réceptif est seul dans cette région. Mais le fait de n'être qu'avec le créateur lui procure précisément la fortune. Ainsi la terre doit n'être qu'avec le ciel, le fonctionnaire doit ne servir que le prince, la femme ne doit dépendre que de l'homme.
La fortune découlant du repos et de la persévérance a pour fondement le fait que l'on se conforme à la nature infinie de la terre.
La terre est en repos. Elle n'agit pas d'elle-même, mais reçoit constamment en elle l'influence du ciel. C'est ainsi que sa vie devient inépuisable et éternelle. De même l'homme parvient à l'éternité en ce qu'il ne veut pas tout faire de lui-même en se glorifiant de ses propres forces, mais s'ouvre paisiblement et à chaque instant aux impulsions émanant des profondeurs des puissances créatrices.
L'IMAGE:
L'état de la terre est LE DON DE SOI RÉCEPTIF.
Ainsi l'homme noble à la vaste nature porte le monde extérieur.
Le ciel se meut puissamment. C'est pourquoi il est dit de lui :
" Il va". La terre accomplit au moyen de la forme. C'est pourquoi il est dit d'elle : "état ". La terre est redoublée ; cela indique son caractère massif qui est nécessaire pour qu'elle puisse s'abandonner sans perdre son essence. De même l'homme doit posséder la force intérieure, une nature massive et vaste pour être en mesure de supporter le monde sans être influencé par lui.
Six au commencement 10 :
[435]
a. Si l'on marche sur du givre, la glace solide n'est pas loin.
b. Si la force obscure commence à se figer et continue ainsi, cela va jusqu'à la glace solide.
Le premier trait contient l'avertissement de ne pas considérer légèrement le mal à ses débuts ; car, si on le laisse à lui-même, le mal
Autre leçon. Six au commencement: On marche sur du givre ; la force obscure commence à se figer. Si cela continue, on parvient à la glace solide. progresse fatalement de même que la glace de l'hiver suit le givre de l'automne.
Six à la deuxième place :
a. Direct, carré, grand. Sans dessein, rien pourtant ne demeure qui ne soit favorisé.
b. Le mouvement du six à la deuxième place 11 est direct, et par suite carré.
" Sans dessein, rien pourtant ne demeure qui ne soit favorisé ", car dans la nature de la terre se trouve la lumière.
Parce que le réceptacle dirige ses mouvements en se conformant au créateur, tous ses mouvements sont exactement ce qu'ils doivent être. Ainsi la terre engendre toutes les créatures, chacune d'après sa nature, en conformité avec la volonté du créateur. Le carré, le ferme se rapportent à l'immuable. Chaque sorte d'êtres vivants a ses lois d'existence fixes d'après lesquelles elle se développe d'une façon indépendante. En cela consiste la grandeur de la terre.
Cependant elle n'a pas besoin de dessein pour cela. Toutes choies deviennent spontanément comme elles doivent le faire ; car la vie possède une lumière intérieure dans la loi du ciel à laquelle elle doit obéir sans le vouloir.
Six à la troisième place :
a. Traits cachés : On est capable de demeurer persévérant.
[436]
Si par hasard tu es au service d'un roi, ne recherche pas les travaux, mais parachève.
b.
" Traits cachés. On est capable de demeurer persévérant." On doit les faire briller au moment opportun. "Si tu es au service d'un roi, ne recherche pas les travaux, mais parachève. " Cela montre que la lumière de la sagesse est grande.
Cacher la beauté ne signifie pas demeurer inactif, mais cela veut dire seulement que l'on ne se montre pas à
Le texte du commentaire donne expressément le six à la deuxième place comme maître de l'hexagramme. contretemps. Lorsque le moment est venu, on doit alors se manifester.
" Si l'on est au service d'un roi " : ce qui suit est supprimé dans le texte du commentaire qui, souvent, ne s'applique qu'aux phrases du texte primitif. Si l'on ne se glorifie pas de ses mérites, mais que l'on veille seulement à ce que tout soit réalisé, c'est un signe de grande sagesse.
Six à la quatrième place :
a. Sac ficelé. Pas de blâme, pas d'éloge.
b.
" Sac ficelé. Pas de blâme, pas d'éloge. " Grâce à la prudence on demeure exempt de dommages.
On a ici un trait yin à une place yin ; ainsi la force yin croît, et par suite la contraction est aussi forte que dans un sac ficelé. Il s'ensuit naturellement un isolement relatif qui, toutefois, libère des obligations.
Six à la cinquième place :
a. Un vêtement de dessous jaune procure une sublime fortune.
b.
" Un vêtement de dessous jaune procure une sublime fortune ". La beauté est à l'intérieur 12.
[437]
La position du six à la cinquième place ressemble à celle du six à la troisième place. Ici également la place donne une certaine force qui est neutralisée par la nature du trait. C'est pourquoi là comme ici la beauté est cachée.
Six en haut :
a. Des dragons se battant dans le pré.
Leur sang est noir et jaune.
b.
" Des dragons se battant dans le pré. "
Le chemin parvient à son terme.
Cf.
" Toute la gloire de cette fille de roi est à l'intérieur ".
(D'après le Ps. 44,14, Vulgate.) (N.d.T.) Le six supérieur cherche à tenir bon, bien que la situation obscure touche à son terme. En un tel moment, le principe obscur sort du domaine de ce qui est moralement indifférent pour devenir franchement mauvais. Il entre donc en lutte avec la puissance lumineuse qui vient de l'extérieur à la rencontre de l'obscurité ; les deux éléments subissent l'un et l'autre du dommage.
Tous les traits sont des six :
a. La persévérance durable est avantageuse.
b.
" Persévérance durable. " Cela finit dans de grandes choses.
Puisque tous les six se transforment, ils deviennent des traits lumineux, c'est-à-dire grands.
Commentaire des paroles du texte
(Wen Yen)
Tandis que l'hexagramme le créateur comportait plusieurs commentaires, le réceptif n'en possède qu'un seul.
Sur l'ensemble de l'hexagramme
Le RÉCEPTIF est parfaitement malléable, et pourtant il est ferme dans son mouvement. Il est parfaitement calme, et pourtant il est carré de nature.
[438]
La jument est soumise et pourtant forte. Il en est de même du réceptif, car ce n'est qu'ainsi qu'il peut être le pendant du créateur. Parfaitement calme à l'intérieur parce qu'entièrement dépendant, il est lié de façon immuable à des lois fixes dans ses manifestations qui sont la production des différentes espèces.
" Ferme dans le mouvement" est l'explication des paroles du texte : "Sublime succès". "Calme et pourtant carré" est l'explication des paroles du texte : "La persévérance est avantageuse ".
"S'il suit, il trouve une direction"
et obtient ainsi quelque chose de durable.
" Il embrasse toutes choses "
et sa faculté de transformation est pleine de lumière.
Ces phrases sont des amplifications du Commentaire sur la décision. Il est ici question du mouvement du réceptif correspondant aux saisons d'été et d'automne
(sud et ouest), au cours desquelles il se trouve réuni aux
" amis " : obéissant aux lois du ciel, il donne la vie aux différents êtres, chacun suivant sa nature ; il participe ainsi à l'éternité du ciel, embrasse toutes choses et les porte à la maturité ; il manifeste par là en pleine lumière son pouvoir de transformer les choses.
La Voie du réceptif, comme elle est donc pleine d'abandon ! Il reçoit en lui le ciel et opère en son temps.
Ces deux activités correspondent à l'hiver et au printemps
(ou encore au nord et à l'est). Il y a ici une allusion à l'union solitaire avec le créateur, à la réception de la semence et à sa paisible maturation jusqu'à la naissance.
Les commentaires traitant du réceptif s'appuient sur le caractère du six à la deuxième place, de même que ceux concernant le créateur ont pour base le neuf à la cinquième place.
LES TRAITS:
Six au commencement :
[439]
Une maison qui entasse bien sur bien est assurée d'avoir une abondance de bénédictions. Une maison qui entasse mal sur mal est assurée d'avoir une abondance de maux. Là où un serviteur tue son maître, où un fils tue son père, les causes ne se trouvent pas entre le matin et le soir d'un jour. Si les choses sont allées si loin, c'est que cela s'est préparé très progressivement. Cela est venu de ce que l'on n'a pas arrêté assez tôt ce que l'on aurait dû arrêter.
Il est dit dans le Livre des Transformations :
" Si l'on marche sur du givre, la glace solide n'est pas loin ". Cela montre où l'on en arrive quand on laisse les choses suivre leur cours.
Selon Tchou Hi, la dernière phrase devrait se lire ainsi :
" Cela se rapporte à l'attention nécessaire ",
(pour arrêter à temps les choses qui doivent, de par leur nature, avoir des conséquences mauvaises).
Six à la deuxième place :
Le caractère direct se rapporte à la rectification des choses ; le caractère carré, à l'accomplissement des devoirs. L'homme noble est sérieux afin de rendre direct l'intérieur de son être ; il fait son devoir pour rendre son extérieur carré. Là où le sérieux et l'accomplissement du devoir sont fermement fixés, le caractère ne devient pas unilatéral.
"Direct, carré, grand : sans dessein, rien pourtant ne demeure qui ne soit favorisé" ; car on n'est pas dans l'incertitude sur ce que l'on doit faire.
Grâce au sérieux pratiqué d'une façon conséquente, l'intérieur devient juste ; grâce à l'accomplissement du devoir dans les actes, l'extérieur devient correct
(carré). Le devoir
[440] exerce une action formatrice sur l'extérieur, mais ce n'est pas quelque chose d'extérieur. Grâce au sérieux et à l'accomplissement du devoir, le caractère se développe richement de lui-même ; la grandeur vient d'elle]même sans qu'on la recherche. C'est pourquoi l'on atteint l'attitude juste, d'instinct, sans réflexion, parce que l'on est exempt des scrupules et des doutes dont les flottements anxieux affaiblissent le pouvoir de décision.
Six à la troisième place :
La force obscure possède la beauté, mais la cache. C'est ainsi que l'on doit être lorsqu'on entre au service d'un roi. On ne doit pas revendiquer pour soi l'oeuvre achevée. C'est la voie de la terre, la voie de la femme, la voie du serviteur. La voie de la terre est de ne pas manifester d'oeuvre achevée, mais de mener toutes choses à leur terme en jouant le rôle de suppléant. Le devoir de celui qui adopte une position subordonnée est de ne pas vouloir être indépendant, mais de dissimuler sa propre valeur et de laisser revenir le mérite entier de l'oeuvre accomplie au maître pour lequel on travaille.
Six à la quatrième place :
Lorsque le ciel et la terre créent dans le changement et la transformation, toutes les plantes et tous les arbres prospèrent ; mais lorsque le ciel et la terre se ferment, l'homme de valeur se retire dans l'obscurité.
Il est dit dans le Livre des Transformations :
"Sac ficelé. Pas de blâme, pas d'éloge". C'est un conseil de prudence.
Le six à la quatrième place se trouve dans le voisinage du prince mais il ne trouve aucun crédit auprès de lui ; par suite, la seule attitude juste est, dans ce cas, de se fermer au monde. C'est l'état de repos du principe obscur, l'état où il se ferme
(voir plus haut). [441]
Six à la cinquième place :
L'homme noble est jaune et modéré, et ainsi il agit raisonnablement à l'extérieur.
Il recherche la juste place et réside dans l'essentiel. Sa beauté est intérieure, mais elle exerce une influence libératrice sur ses membres et s'exprime dans ses oeuvres. C'est la beauté suprême.
Le jaune est la couleur du milieu et de la modération. La modération intérieure agit à l'extérieur en imprégnant de raison la forme de toutes ses manifestations. La juste place que l'homme noble cherche pour lui se trouve dans les bons usages qui laissent le premier rang aux autres et font que l'on se retire modestement. La grâce discrète qui, bien qu'invisible, se manifeste dans tous les mouvements et les ouvrages est la beauté suprême.
Il existe une différence caractéristique entre ce qui est dit des traits du créateur et ce que l'on expose à propos de ceux du réceptif. Dans le premier hexagramme, l'accent est mis sur sa nature vraie et assurée, tandis que dans le second, les qualités soulignées sont le sérieux, le caractère consciencieux et l'humilité. Il s'agit ici de la même chose, mais vue sous un angle différent. Seule la vérité donne le sérieux, seul le sérieux rend possible la vérité.
Six en haut :
Si l'obscurité cherche à égaler la lumière, il y a sûrement combat. Pour que l'on ne croie pas qu'il n'y a plus de lumière, le dragon se trouve nommé ici. Mais pour montrer clairement qu'il n'y a pas de déviation de leur nature, le sang est également nommé. Le noir et le jaune sont le ciel et la terre confondus. Le ciel est noir et la terre est jaune.
Cette explication est formulée d'une manière qui manque de clarté : au dixième mois, la force obscure a remporté une victoire complète. La dernière clarté restante est chassée.
[442] Le soleil a atteint son point le plus bas. L'obscurité règne sans retenue. Mais c'est là précisément la raison de la transformation. Le solstice survient et la lumière lutte de nouveau avec l'obscurité. Il en est ainsi dans tous les domaines. Le principe obscur ne peut exercer la souveraineté ; il n'est à sa place légitime que lorsqu'il est conditionné par la lumière et qu'il lui est soumis. Si l'on n'y prend garde et si le principe obscur veut sortir de l'intérieur de sa sphère vers l'extérieur, dans le champ de l'action, la puissance de la lumière se manifeste. Le dragon qui en est le symbole apparaît alors et refoule l'obscurité à l'intérieur de ses limites, montrant ainsi que le principe lumineux est toujours là. Le sang est le symbole du principe obscur, comme le souffle est celui du principe lumineux. Etant donné que le sang coule, l'obscurité est blessée. Mais le sang ne provient pas seulement du principe obscur : le principe lumineux pâtit également de cette lutte ; c'est pourquoi la couleur est caractérisée comme jaune et noire. Le noir, ou plutôt le bleu de nuit, est la couleur du ciel, de même que le jaune est la couleur de la terre.
(On notera que la répartition des couleurs alléguée ici est différente de celle donnée dans les remarques sur les huit trigrammes où le créateur est dit rouge, et le réceptif, noir, obscur.)
REMARQUE. Contrairement à ce qui est dit du créateur, les différents traits ne sont pas ici dans une relation de développement les uns à partir des autres, mais ils sont sans connexions mutuelles. Chacun représente une situation particulière. Le créateur représente le temps qui suppose une succession, tandis que le réceptif traduit l'espace qui manifeste une juxtaposition.
Les différents traits appellent les observations suivantes le premier trait et le trait supérieur, donc les deux places extérieures, sont défavorables. C'est que la place qui convient au réceptif n'est pas à l'extérieur, mais à l'intérieur. Le premier trait montre le principe obscur dans l'initiative
(cf. l'hexagramme n° 44 : Kou, Venir à la rencontre) ; cela signifie un danger. C'est pourquoi le principe obscur est représenté comme quelque chose d'objectif qui, au moment voulu, doit être refréné. A la place supérieure, il s'arroge la souveraineté et entre en rivalité avec le principe lumineux. Ici encore il est représenté objectivement comme ce contre [443] quoi on lutte (cf. l'hexagramme n° 43 : Kouai, la résolution), car ces deux situations ne correspondent pas à la nature de l'homme noble. Or le Livre des Transformations est composé uniquement pour les hommes nobles. C'est pourquoi tout ce qui est vulgaire est toujours quelque chose d'extérieur, d'objectif.
Les deux traits médians sont l'un et l'autre favorables à cause de leur position centrale. Toutefois, à l'inverse de ce qui se passe pour l'hexagramme précédent, le créateur, le maître du signe se trouve ici à la deuxième place, car il est de la nature du réceptif d'être en bas. Ici se manifeste par conséquent la manière d'être de la terre, de la nature matérielle et spatiale dans laquelle toutes choses opèrent spontanément. La cinquième place traduit l'humilité dans la nature humaine. Le fait qu'il y soit question de vêtements suggère l'image d'une princesse plutôt que d'un prince.
(Cf. l'hexagramme n° 54 : Kouei Mei, l'épousée, six à la cinquième place.) Les deux traits de transition ont une signification neutre. Sans doute, le troisième a la possibilité d'entrer au service d'un roi, car la faiblesse de la nature est compensée par la force de la place. Mais, tandis que le troisième trait de
K'ien contient lui-même sa fin, le trait correspondant de
K'ouen renonce à lui-même et ne se soucie que de servir les autres. Le quatrième trait est trop faible (trait malléable à une place faible). De plus, il n'est pas en relation avec le cinquième trait, et c'est pourquoi il ne lui reste qu'à s'enfermer en lui-même. Le quatrième trait correspond, dans sa passivité exaltée, à l'activité exaltée du neuf à la troisième place dans l'hexagramme précédent, de même que le troisième trait dans ses possibilités indéterminées correspond au neuf à la quatrième place de K'ien.
[444]