TCHOUEN / LA DIFFICULTE INITIALE 3
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Trigrammes nucléaires
KEN
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et K'OUEN
— —— —— —L'hexagramme Tchouen a pour maîtres le neuf du début et celui de la cinquième place. Il ne possède que ces deux yang. Le neuf initial est en bas et signifie l'auxiliaire qui peut calmer le peuple. Le neuf à la cinquième place est en haut ; il peut engager l'auxiliaire pour calmer le peuple.
L'ordre de succession des hexagrammes
Voir 13.
Après que le ciel et la terre sont venus à l'existence, les êtres individuels commencent à se développer. Ce qui remplit l'espace entre le ciel et la terre, ce sont précisément les êtres individuels. C'est pourquoi vient ensuite l'hexagramme LA DIFFICULTÉ INITIALE. La difficulté initiale est la même chose que le fait de remplir.
Tchouen ne signifie pas à proprement parler
" remplir ". L'idée est la difficulté qui naît quand le ciel et la terre – le principe lumineux et le principe obscur – se sont unis pour la première fois et que tous les êtres ont été engendrés et sont nés. Cela produit un chaos qui remplit toutes choses.
[445]
L'idée de remplir est par suite mise en relation avec l'hexagramme Tchouen.
Su Koua: Neuvième aile. Il n'existe pas de texte de cette aile pour les deux premiers hexagrammes.
(Note de la traduction anglaise.) La connexion des hexagrammes entre eux
Tchouen est visible, mais il n'a pas encore perdu sa demeure.
L'herbe a déjà fait percer ses pointes à travers la terre ; elle est donc visible, mais elle est encore dans la terre, sa demeure d'origine. Le trigramme nucléaire supérieur
(la montagne) indique le caractère visible, celui du bas (la terre), la demeure.
LE JUGEMENT:
La DIFFICULTÉ INITIALE opère une sublime réussite, favorisant par la persévérance. Ne rien entreprendre. Il est avantageux d'engager des auxiliaires.
Commentaire sur la décision
La DIFFICULTÉ INITIALE : le ferme et le malléable s'unissent pour la première fois et la naissance est difficile.
Le trigramme inférieur est Tchen, le fils aîné, qui naît du premier rapprochement de la force lumineuse et de la force obscure. Cela indique une première union. Kan signifie la difficulté, le danger. Cela indique la difficulté de la naissance.
Le mouvement au milieu du danger procure une grande réussite et la persévérance.
Le trigramme inférieur, Tchen, est le mouvement ; le trigramme supérieur, K'an, est le danger. Il s'agit donc du mouvement au sein du danger. De cette manière on sort du danger. Ainsi se trouvent expliquées les paroles du texte :
" Sublime réussite, favorisant par la persévérance ".
[446] Le mouvement du tonnerre et de la pluie remplit l'atmosphère. Si le chaos et l'obscurité prédominent pendant que le ciel est en train de créer, il convient d'engager des auxiliaires sans se laisser endormir pour autant dans sa tranquillité.
Ici également l'état de l'atmosphère en train de se remplir est caractérisé par les difficultés qui s'accumulent jusqu'au point où un orage éclate. Pourtant le résultat final est déjà suggéré par le fait que l'ordre retenu n'est pas formé des nuages
(K'an) en bas et du tonnerre (Tchen) en haut, mais qu'au contraire le tonnerre est nommé le premier, et ensuite la pluie, c'est-à-dire les nuages qui se résolvent en pluie. De même que le tonnerre et les nuages sombres précèdent le déclenchement de l'orage, dans les affaires humaines une ère de chaos précède les époques d'ordre. En un pareil moment le prince auquel est confiée la mise en ordre du chaos a besoin d'auxiliaires de valeur. Toutefois la situation demeure au début sérieuse et difficile. On ne doit pas vouloir se reposer sur les autres. Cette phrase est suggérée par les deux maîtres de l'hexagramme. Si le neuf initial signifie l'auxiliaire valeureux que l'on doit s'adjoindre aux moments de danger, le neuf à la cinquième place veut dire que l'on a encore des difficultés, si bien que l'on ne doit pas s'abandonner au repos. En raison des conditions précaires, le neuf à la cinquième place doit continuer d'attendre la solution. Il ne doit pas encore prendre de repos.
L'IMAGE:
Nuages et tonnerre : image de la DIFFICULTÉ INITIALE ; c'est ainsi qu'agit l'homme noble en démêlant et en mettant en ordre.
Tandis que dans le Commentaire sur la décision on nomme le tonnerre et la pluie pour indiquer l'état final provoqué par le mouvement, les nuages et le tonnerre sont ici mentionnés d'après la figure de l'hexagramme. Ainsi est caractérisé l'état précédant la pluie, laquelle symbolise le danger
(K'an). Pour le vaincre, on doit séparer et unir,
[447] comme cela se produit lorsque éclate l'orage : tout d'abord les nuages sont en haut et le tonnerre en bas, puis le tonnerre est en haut et la pluie en bas.
LES TRAITS:
Neuf au commencement :
a. Hésitation et obstacles. Il est avantageux de demeurer persévérant. Il est avantageux d'engager des auxiliaires.
b. Bien que les hésitations et les obstacles prédominent encore, le travail vise à réaliser ce qui est juste. L'homme éminent qui s'abaisse au-dessous des hommes inférieurs gagne pleinement le coeur de tous.
Ce trait est le maître de l'hexagramme. Il est indiqué par là que les difficultés initiales persistent et n'ont pas été résolues. On ne peut alors rien faire d'un seul coup. Le chaos doit être éclairci progressivement. La nature et la place du trait montrent la voie juste à suivre pour atteindre ce but. Il est de sa nature lumineux et ferme, donc éminent. Et, en cette qualité, il se place sous les faibles traits yin qui ne peuvent s'aider eux-mêmes. Dominer en servant, c'est là le secret de la réussite. Ainsi ce trait est l'auxiliaire de valeur dont on a besoin aux moments où se manifestent les difficultés initiales, afin de vaincre les obstacles.
Six à la deuxième place :
a. Les difficultés s'accumulent. Le cheval et le chariot se séparent. Ce n'est pas un brigand, il fera sa demande en son temps. La jeune fille est chaste, elle n'engage pas sa foi. Dix ans, et elle engage alors sa foi.
b. La difficulté du six à la deuxième place est qu'il repose sur un trait dur. Le fait que la jeune fille qu'il représente engage sa foi au bout de dix ans signifie un retour à la règle générale.
[448]
Ce trait est au coeur des difficultés initiales. Sa relation normale le rattache au neuf à la cinquième place avec lequel il se trouve en correspondance. Cependant cette relation est troublée par l'influence du neuf initial qui se trouve au-dessous et qui, par ses importunités
(il est en outre l'un des maîtres de l'hexagramme), provoque le doute et l'incertitude. Mais comme le six à la deuxième place est central et correct, ces tentations sont surmontées et, lorsque la période de difficulté parvient à sa fin – dix ans représentent un cycle complet –, la règle générale reprend force et l'union avec le neuf à la cinquième place se réalise.
Six à la troisième place :
a. Qui chasse le cerf sans forestier ne fait que s'égarer dans le bois. L'homme noble comprend les signes du temps et préfère s'abstenir. Continuer apporte l'humiliation.
b.
" Il chasse le cerf sans forestier" c'est-à-dire il convoite le gibier. "L'homme noble comprend les signes du temps et préfère s'abstenir. Continuer apporte l'humiliation. "
Cela conduit à l'échec.
Ce trait est faible à une place forte et, en outre, au sommet du trigramme du mouvement. Il en résulte le risque que son mouvement soit incontrôlé et troublé par la convoitise. Un tel mouvement ne peut conduire qu'à l'échec.
Au point de vue des trigrammes nucléaires, le troisième trait appartient en premier lieu au trigramme nucléaire inférieur, K'ouen. Considéré sous cet angle, il a abandonné le maître et guide et n'a retenu que le mouvement. Ici s'applique la sentence de l'hexagramme

K'ouen :
" Si l'on se met en avant, l'on s'égare ". La forêt est suggérée par le trigramme nucléaire supérieur qui signifie la montagne et dans le domaine duquel on pénètre ici. Etant donné que le six à la troisième place n'a pas de trait correspondant à la sixième, il échoue et ne trouve pas le gibier recherché.
Six à la quatrième place :
[449]
a. Cheval et chariot se séparent. Poursuis l'union. Aller apporte la fortune. Tout opère de façon avantageuse.
b. Si l'on ne va que lorsqu'on est invité, c'est la clarté.
Le trait est en relation de correspondance avec le neuf initial. L'idée suggérée est que l'on attend jusqu'au moment où l'on est prié. L'action de prier quelqu'un est exprimée par le neuf initial qui se met au-dessous du six à la quatrième place. Ce neuf initial est le maître actif de l'hexagramme ; en face de lui le six à la quatrième place signifie un homme vertueux qui est assez sage pour ne pas offrir ses services, mais attendre jusqu'au moment où il est invité.
Neuf à la cinquième place :
a. Difficultés dans la bénédiction. Un peu de persévérance apporte la fortune ; beaucoup de persévérance apporte l'infortune.
b.
" Difficultés dans la bénédiction ", car les bienfaits ne sont pas encore reconnus.
Ce trait est l'un des maîtres de l'hexagramme, et, comme il est central et correct, il serait en mesure d'exercer une action bénéfique. Mais cette action est contrecarrée de plusieurs manières. D'une part, il se trouve au centre de K'an, la gorge, fermée des deux côtés par des murailles abruptes, si bien que comme dans le cas d'une rivière coulant entre deux rives escarpées, ses effets ne peuvent profiter à l'entourage. D'autre part, le six à la deuxième place est trop faible, bien qu'en lui-même il se trouve dans une relation de correspondance, tandis que le neuf initial, qui est l'autre maître de l'hexagramme, n'est pas directement relié au cinquième trait. Par suite, du point de vue individuel de ce deuxième trait, le neuf à la cinquième place est plutôt tenu pour un rival. Enfin, ce dernier trait se trouve au sommet du trigramme nucléaire supérieur

Ken qui a pour propriété l'immobilisation et vient par suite contrarier l'influence.
[450]
Six en haut :
a. Cheval et chariot se séparent.
Il coule des larmes de sang.
b.
" Il coule des larmes de sang. "
Comment pourrait-on demeurer longtemps ainsi ?
Ce trait, tout comme le deux et le quatre, a pour symbole le chariot qui s'arrête et est dételé. Mais tandis que le six à la deuxième place est à la fois en relation avec le neuf initial et avec le neuf à la cinquième place, et que par suite il doit seulement éviter d'établir un faux lien ; que, d'autre part, le six à la quatrième place est en correspondance avec le neuf initial et trouve là un lien convenable, le six supérieur est complètement isolé parce qu'il n'a pas de trait correspondant à la troisième place. Au sommet du trigramme

K'an dont le symbole est un chariot endommagé, il
(le trait représentant le voyageur 14) doit nécessairement dételer. Toutefois il n'y a personne pour venir à son secours et c'est pourquoi l'on voit apparaître les autres symboles du trigramme K'an, l'eau (les larmes), et le sang. Mais cette situation désespérée ne dure pas. En effet, comme le trait supérieur est un six, il se transforme en son opposé et le trigramme du danger et de la gorge donne naissance au trigramme

Souen qui signifie le vent, et par suite triomphe de la stagnation. Dans une telle situation il faut par conséquent provoquer rapidement un changement.
REMARQUE. L'hexagramme dans son ensemble a le caractère de la difficulté initiale. Les différents traits représentent les différentes situations qui se présentent au temps de la difficulté initiale. Dans la position réciproque des différents traits seule entre en ligne de compte la situation objective, à l'exclusion de leur caractère subjectif et de leur position à l'intérieur de l'ensemble de l'hexagramme. Ainsi le neuf à la cinquième place et le neuf initial sont les maîtres de l'ensemble de l'hexagramme ; le neuf à la cinquième place est le suzerain qui fait du neuf initial son vassal. Si par
[451] contre on les considère isolément, le neuf initial n'entre pas en ligne de compte comme auxiliaire du neuf à la cinquième place, mais seulement comme son rival en raison de sa position objective qui exerce une action d'attraction sur le six à la deuxième place, trait placé en correspondance avec le neuf à la cinquième place. Il est nécessaire d'avoir constamment présente à l'esprit cette règle relative à l'étude des différents traits.
Une autre idée valable pour l'ensemble du Livre des Transformations est que les différents traits désignent les temps. Toutefois l'application des hexagrammes dépend des hommes. Ici par exemple se trouve désigné le temps de la difficulté initiale. L'application sera différente suivant que l'individu placé dans ce temps est un souverain, un fonctionnaire ou un particulier. Toutefois les lignes de direction essentielles sont naturellement les mêmes. Elles doivent seulement être chaque fois adaptées aux cas particuliers.
Précision empruntée à la traduction anglaise.
(N.d.T.) Un coup d'oeil d'ensemble sur les différents traits fait apparaître une double attitude à l'égard du temps de la difficulté initiale. Dans le cas de certains traits la difficulté initiale doit être vaincue par l'activité personnelle et, pour le reste, par les circonstances extérieures ; là où ces moyens de vaincre font défaut, l'issue est fâcheuse.
Les places fortes 1, 3 et 5 représentent l'entrave provoquée par l'activité personnelle. Le neuf initial et le neuf à la cinquième place sont forts, et par suite on donne le conseil suivant : le neuf initial requiert de la patience, de la stabilité et des auxiliaires ; le neuf à la cinquième place doit apprendre à agir progressivement et par étapes ; par contre, le six à la troisième place manque de directives ; c'est pourquoi la décision le concernant n'augure pas le succès.
Les places faibles 2, 4 et 6 dépendent d'une aide extérieure :
" Si seulement quelque chose survenait et me prenait en charge ! "Le six à la deuxième place et le six à la quatrième place trouvent tôt ou tard des concours, telle une vierge qui trouve un prétendant pour la délivrer. Par contre, le six d'en haut est trop à l'extérieur et demeure isolé, si bien que la difficulté initiale n'est pas vaincue. Dans ce cas il est indiqué de rompre complètement et d'entamer une nouvelle situation.
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