FONG / L'ABONDANCE, LA PLENITUDE 55
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Trigrammes nucléaires
TOUEI
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et SOUEN
——————— —Le maître de l'hexagramme est le six à la cinquième place. Quand il est dit dans le jugement :
" Le roi parvient à la plénitude. Ne sois pas triste : tu dois être comme le soleil à midi ", cela se rapporte à ce trait qui est la place du roi. Le trait est malléable et se tient au centre : c'est le caractère du soleil à midi.
L'ordre de succession
Celui qui atteint une place où il est chez lui est sûrement grand. C'est pourquoi vient ensuite l'hexagramme : L'ABONDANCE. Abondance signifie grandeur.
La connexion des hexagrammes entre eux
L'ABONDANCE signifie le grand nombre d'occasions.
L'hexagramme se compose de

Tchen qui tend vers le haut et de

Li qui se meut dans la même direction. Les trigrammes nucléaires sont Touei, le joyeux, le lac, et Souen, le pénétrant, le vent. Par suite le vent et l'eau, ainsi que le tonnerre et l'éclair sont ici ensemble et tout cela indique une grande puissance. Un certain sommet est suggéré par
[744] le fait que Tchen, dont le mouvement est le plus vigoureux, se trouve en haut. Tandis que dans Chi Ho,
" mordre au travers" (n° 21), il s'agit de la manière de vaincre un obstacle, ici l'obstacle est déjà vaincu. Mais auprès du sommet de la grandeur il y a aussi le danger de retour en arrière. La lumière est obscurcie jusqu'à un certain point par le trigramme nucléaire Souen, le bois. L'hexagramme est l'un de ceux qui se rapportent à la mutabilité de toutes les choses terrestres. C'est aussi probablement le sens de la phrase : "L'abondance signifie un grand nombre d'occasions ", à savoir des occasions de souci et de chagrin.
LE JUGEMENT:
L'ABONDANCE a du succès.
Le roi parvient à la plénitude.
Ne sois pas triste : tu dois être comme le soleil à midi.
Commentaire sur la décision
L'ABONDANCE signifie la grandeur. Clarté dans le mouvement, donc abondance.
"Le roi parvient à la plénitude."
L'accent est ainsi mis sur la grandeur.
'"Tu dois être comme le soleil à midi."
On doit illuminer le monde entier.
Lorsque le soleil est à midi, il commence à décliner ; quand la lune est dans son plein elle se met à décroître. La plénitude et le vide du ciel diminuent et augmentent dans le cours du temps : combien plus cela ne se produit-il pas chez les hommes, les esprits et les dieux !
Fong représente une époque où la clarté et le progrès permettent de parvenir à la grandeur et à la prospérité dans la vie sociale. Il faut pour cela une forte personnalité qui attire à elle les êtres de nature semblable. C'est pourquoi
[745] ce n'est pas la relation de correspondance, mais celle de convenance qui doit être prise en ligne de compte
(voir le neuf au commencement et le neuf à la quatrième place, de même que le six à la deuxième place et le six à la cinquième). Mais une telle époque de civilisation épanouie renferme des dangers. En effet, selon les lois générales qui gouvernent le monde, toute augmentation est suivie d'une diminution et toute plénitude d'un vide. Il n'y a qu'un moyen d'affermir les fondations au temps de la grandeur, à savoir l'expansion spirituelle. Toute limitation apporte avec elle une rétribution amère. L'abondance ne peut durer que si des groupes toujours plus larges sont appelés à la partager, car c'est seulement alors que le mouvement peut se poursuivre sans se muer en son opposé.
L'IMAGE:
Le tonnerre et l'éclair surviennent tous deux :
image de l'ABONDANCE.
Ainsi l'homme noble tranche les procès et exécute les châtiments.
L'IMAGE:
est immédiatement compréhensible, en particulier si on la met en relation avec l'hexagramme
" mordre au travers " (n° 21). Les deux trigrammes Li, la clarté, et Tchen, l'ébranlement, fournissent les conditions préalables de la clarification dé l'atmosphère par l'orage des procès criminels.
LES TRAITS:
Neuf au commencement :
a. Quand un homme rencontre le maître qui lui était destiné ils peuvent rester ensemble dix jours et il n'y a pas de blâme. Si l'on va de l'avant on trouve crédit.
b.
" On peut rester ensemble dix jours et il n'y a pas de blâme ". Plus de dix jours serait mauvais.
[746]
Le trait est fort et lumineux. Le maître de même nature qui lui est destiné et qu'il rencontre est le neuf à la quatrième place. Le mot a

souen n désigne un espace de temps de dix jours, une période complète. Malgré la situation d'abondance on peut passer un cycle entier de temps avec un ami de mêmes dispositions intérieures sans avoir de faute à redouter. Par suite on peut s'avancer en toute sûreté et le rechercher s'il occupe une position élevée. Toutefois le commentaire prévient qu'il ne faut pas dépasser la limite et s'attacher à lui lorsque la tâche est accomplie. Cela est mauvais. C'est précisément dans les temps d'abondance qu'il faut pouvoir s'arrêter au moment voulu.
Les interprètes Song prennent le mot

souen au sens de
" semblable" ; ce serait une insistance sur pe qui veut dire : "de même nature, destiné à quelqu'un ".
Six à la deuxième place :
a. Le rideau est d'une telle densité qu'on voit l'étoile polaire à midi.
En allant de l'avant on rencontre méfiance et haine.
Si on les suscite par la vérité, la fortune vient.
b.
" Si on les suscite par la vérité ",
c'est-à-dire que l'on doit exciter sa volonté par la loyauté.
Le trigramme nucléaire Souen, bois, obscurcit le trait qu'il recouvre, mais ici et en ce qui concerne le neuf à la quatrième place, l'obscurcissement est moins marqué que dans le cas du neuf à la troisième place, le centre, où il est particulièrement fort. Comme le trait est faible, il rencontre seulement le doute et la haine lorsqu'il se tourne vers le prince qui est le sien, le six à la cinquième place qui est également faible. Mais parce qu'il est central et correct, la puissance de la vérité intérieure le rendra capable de surmonter la séparation et d'exciter la volonté du souverain.
[747]
Neuf à la troisième place :
a. Le fourré est d'une telle densité qu'on voit les petites étoiles à midi. Il se brise le bras droit. Pas de blâme.
b.
" Le fourré est d'une telle densité " que l'on ne doit pas traiter de grosses affaires.
c.
" Il se brise le bras droit " : finalement on ne doit pas essayer de faire quoi que ce soit.
L'obscurcissement est ici à son comble. Le trigramme nucléaire

Souen est réuni au trigramme nucléaire Touei, le lac, qui limite la possibilité d'accomplir de grandes choses. Touei signifie briser. Le bras droit est suggéré par le six faible au sommet qui, conformément aux relations existant dans cet hexagramme, ne doit pas être pris en considération comme aide au neuf fort à la troisième place. Si l'on se retire de l'action en reconnaissant que c'est impossible, on demeure sans blâme.
Le mot pe rendu par
" fourré" signifie également une masse d'eau et mo qui est traduit par "petites étoiles " signifie également l'écume, la bruine. Cependant l'interprétation donnée plus haut semble mieux s'accorder avec le contexte.
Neuf à la quatrième place :
a. Le rideau est d'une telle densité que l'on voit l'étoile polaire à midi. Il rencontre son maître qui est de même nature. Fortune.
b.
" Le rideau est d'une telle densité " place n'est pas celle qui convient.
"On peut voir l'étoile polaire à midi". Il est obscur et ne répand pas de lumière.
Il rencontre son maître qui est de même nature.
" Fortune ". Cela signifie l'action.
[748]
Ici la première phrase est la même qu'au six à la deuxième place ; celle-ci est au commencement, celle-là à la fin du trigramme nucléaire Souen, le bois. La place n'est pas celle qui convient parce que c'est un trait ferme à une place malléable. Le trait n'est plus dans le trigramme Li, il ne répand donc plus de lumière, de par sa nature. La lumière est au-dessous. Cependant le mouvement le rend capable de rencontrer le premier trait qui est de même nature, à savoir également fort. Ainsi la lumière vient au moyen de l'action
(le premier trait est lumineux parce qu'il est dans le trigramme Li) et, avec elle, la fortune.
Six à la cinquième place :
a. Des lignes viennent.
La bénédiction et la gloire se rapprochent. Fortune.
b. La fortune du six à la cinquième place provient du fait qu'il répand la bénédiction. Ce trait est en relation avec le six à la deuxième place. Dans le premier cas le mot employé était
" vont,, ici on a "viennent ". Les lignes sont la force lumineuse qui se rapproche grâce au trigramme Li. la lumière – dont le trait central est le six à la deuxième place – faisant ainsi venir la bénédiction et la gloire.
Six en haut :
a. Sa maison est dans l'abondance. Il cache sa famille. Il guette à travers la porte et ne remarque plus personne. Pendant trois ans il ne voit rien. Infortune.
b.
" Sa maison est dans l'abondance ". Il bat des ailes aux frontières du ciel.
"Il guette à travers la porte et ne remarque plus personne". Il se cache lui-même.
[749]
Le trait faible au sommet du mouvement va trop loin. Ainsi il semble s'élever toujours davantage, mais précisément pour cette raison il perd peu à peu sa position et s'écarte de plus en plus de la lumière, d'autant plus qu'il obscurcit le neuf à la troisième place. C'est pourquoi le six au sommet tombe dans un état d'isolement sans espoir pour lequel il ne peut blâmer que lui-même.